Fondation Louis Vuitton

S'il fallait définir le sentiment que procure la visite de ce musée, le premier serait sans aucun doute: mégalomanie. A l'instar d'un Ramses commandant une pyramide défiant le monde des vivants, le bâtiment commandé par Bernard Arnault à Frank Owen Gehry dépasse l'entendement. Son plus grand mérite revient aux ingénieurs qui ont su transformer une divagation scripturale en une sculpture monumentale. Le résultat est à la mesure de l'empire du luxe qui porte son nom: gigantesque, époustouflant, déconcertant et pervers. La visite de l'intérieur avec ses multiples angles morts, ses coursives, ses dizaines de niveaux, les yeux rivés sur l'imbroglio de traverses métalliques compense la nudité des œuvres présentées comme témoins de la pauvreté créatrice de notre époque en matière d'art. On retrouve édulcoré le système utilisé à Bilbao pour le musée Guggenheim: un habillage d'une grande noblesse sur un pâté de sable en béton truffé d'inutilités formelles qui doit se faire retourner dans leurs tombes, Breuer, Neutra, Le Corbusier et tous les architectes fonctionnalistes. A Bilbao des écailles de titane, ici des panneaux de verre, astucieusement tramés pour évoquer de grandes voiles sans rapport avec la fonction de l'édifice. Le vaisseau étant propulsé par une sorte de spinnaker à faire rêver les sponsors de l'America cup. Au fond un témoin de plus que l'argent permet de tout faire, le meilleur comme le pire. Je serais injuste de ne pas utiliser le terme de remarquable comme de négliger les aperçus spectaculaires offerts par la terrasse supérieure sur le Jardin d'acclimatation et la perspective sur La Défense.